Philippe de Cholet Président Matignon Finances : "Il faut adapter sa stratégie d'investissement".
Bourse : des investisseurs attentistes

20 mai 2016 8 h 46 min
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Les investisseurs dans l’attente ?

Les marchés financiers sont plutôt agités, en l’absence de convictions et de certitudes sur la macro-économie comme sur le scénario principal avec des risques politiques, le #Brexit au Royaume-Uni, les élections en Espagne, la hausse des taux aux Etats-Unis…

Mon invité pour parler de la stratégie d’investissement est Philippe de Cholet Président Matignon Finances qui estime notamment qu’avec la baisse des rendements (cf contrats en euros), il faut adapter sa stratégie.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Philippe de Cholet, bonjour.

Philippe de Cholet – Président Matignon Finances : Bonjour.

Web TV www.labourseetlavie.com : Vous êtes président de Matignon Finances. On va parler avec vous des marchés et de perspectives sur ces marchés. Alors, c’est vrai que quand on parle du mois de mai en général, on se rappelle de ce que disent les boursiers : sell in May and go away. Ce n’est pas toujours le cas. Il y a des années où ça ne se passe pas comme ça. Là, on a senti un peu une fébrilité sur les marchés quand même, un peu d’indécision. Quel est le regard que vous portez aujourd’hui ?

Philippe de Cholet – Président Matignon Finances : C’est vrai qu’on est un petit peu dans une phase d’attentisme qui est assez pénible d’ailleurs à vivre, mais qui a de bonnes raisons. Plusieurs facteurs expliquent cette phase un petit peu où les investisseurs se regardent en chiens de faïence. Vous avez d’un côté des statistiques économiques contrastées au sein même de la Zone euro, même si globalement la croissance est quand même plutôt en train de redémarrer et notamment l’investissement. Dans des pays comme la France, par exemple, c’est poussif, mais ça prend la bonne direction. Aux États-Unis globalement, c’est plutôt satisfaisant, mais vous avez malheureusement cette menace d’une remontée des taux d’intérêt peut-être plus rapide que ce qu’on pensait. Donc ça aussi, ça tend à peser. Vous avez en Chine encore beaucoup d’opacité sur la réalité du ralentissement. Donc, vous êtes à la merci de mauvais chiffres qui peuvent tomber du jour au lendemain. On a vu ce que ça a donné l’été dernier, avec un décrochage assez brutal des marchés. Et puis enfin, vous avez quand même un facteur géopolitique qui tend à prendre de l’importance. Le Brexit dans quelques semaines en Europe. Au Moyen-Orient, la situation n’est quand même pas stabilisée. Aux États-Unis, l’inconnu Trump. Donc, tout ceci explique cette phase d’attentisme qui dure depuis quelques semaines.

Web TV www.labourseetlavie.com : Alors, on a eu quand même pas mal de publications de résultats, aux États-Unis comme en Europe. Est-ce que ça pour le coup, ça a pu conforter quand même les investisseurs qui regardent ça de près ?

Philippe de Cholet – Président Matignon Finances : Oui, bien que le panorama soit assez contrasté. On dit toujours que 60 – 70 % des publications de résultats sont supérieures aux attentes des analystes, mais c’est un peu un faux argument. Lorsqu’on creuse un peu, au-delà des attentes du consensus, on s’aperçoit quand même qu’aux États-Unis, la croissance bénéficiaire dans certains secteurs est vraiment poussive, voire même en recul. Ce qui n’est pas une grosse surprise. On s‘y attendait depuis déjà plusieurs mois, puisqu’on arrive quand même un peu à une fin de cycle dans ce qui est la croissance bénéficiaire américaine. Elle peut redémarrer, cela dit. Ça, c’est la force de l’économie américaine. Elle est toujours très réactive. Mais c’est vrai que ça n’a pas été un grand cru, en termes de publications de résultats aux États-Unis. En Europe, on s’en est plutôt mieux tiré, avec ici et là aussi quelques déceptions. Enfin globalement, pas de grosses surprises par rapport à ce que le marché attendait.

Web TV www.labourseetlavie.com : Alors, on a vu bien sûr toujours le rôle important des banquiers centraux, des banques centrales. Quand la banque japonaise n’a rien fait, eh bien, les investisseurs ont pris peur et le marché actions japonais a immédiatement baissé. Donc, on est toujours dans cette attente d’actions de banques centrales ?

Philippe de Cholet – Président Matignon Finances : Oui, toujours. Ce qui est un peu d’ailleurs pervers quelque part, parce que ça fait quand même maintenant deux – trois ans que les banques centrales et en particulier la Banque Centrale Européenne, mènent la danse, si j’ose dire. Or, on s’aperçoit quand même que les moyens utilisés n’ont plus beaucoup d’impact sur les marchés, même si personnellement, je pense que la politique menée va dans le bon sens et qu’on s’en apercevra sans doute de façon plus manifeste au cours des prochains mois et des prochaines années. Mais c’est vrai que globalement, en tout cas, pour ce qui est des marchés financiers, malgré les déclarations de Draghi qui va toujours plus loin, plus fort, par rapport au quantitative easing mis en œuvre, on s’aperçoit que dans le fond, les marchés n’en tiennent plus vraiment compte, ce qui est un facteur évidemment aggravant, si j’ose dire.

Web TV www.labourseetlavie.com : On a aussi beaucoup parlé forcément du pétrole, avec la chute des marchés pétroliers. On a eu à un moment donné des peurs aussi de l’impact par ricochet sur les banques, sur la situation des banques. On a vu des marchés comme le high yield, où il y avait un fort secteur énergétique, aussi un petit peu chahuté. Est-ce que le pétrole aussi reste toujours un petit peu au cœur des interrogations ?

Philippe de Cholet – Président Matignon Finances : Oui, même s’il y a eu ce rattrapage effectivement qui va paradoxalement plutôt dans le bon sens puisque les marchés avaient sanctionné l’excès à la baisse. Là autour de 40 – 45 dollars, on semble être, en tout cas pour un moment, dans une zone d’équilibre qui aurait plutôt tendance au contraire effectivement à rassurer les investisseurs. Maintenant, tout ça est quand même plus du domaine souvent de la spéculation qu’autre chose. Si on devait apprendre demain que, je ne sais pas, l’Iran par exemple finalement décidait de ne pas se joindre aux autres producteurs pour réduire sa production, ça serait sans doute mal perçu. Et puis les intentions saoudiennes sont toujours assez incertaines sur le sujet. Donc, on est à la merci quand même d’un décrochage brutal du prix du baril, comme on l’avait connu il y a quelques mois, qui ne manquerait pas d’avoir des répercussions sur le marché.

Web TV www.labourseetlavie.com : Alors, on a aussi beaucoup parlé au cours des derniers mois des marchés émergents, avec plutôt en risque d’ailleurs au cours des derniers mois. Est-ce que les marchés émergents retrouvent de l’attrait ? Est-ce que maintenant que peut-être la hausse des taux aux États-Unis est quasiment actée, ils retrouvent de l’intérêt ou pas ?

Philippe de Cholet – Président Matignon Finances : Je pense que globalement, c’est sans doute un peu tôt parce que derrière le concept des marchés émergents, vous avez quand même beaucoup de situations très contrastées d’un continent à l’autre. Vous en avez qui s’en tirent mieux que d’autres. Il est clair que les pays producteurs, je pense à la Russie, au Venezuela, au Nigeria, enfin tous ceux qui sont particulièrement impactés par les prix du baril, ont sans doute bénéficié de cette reprise du prix du pétrole. De là à penser en revanche que les places financières de ces pays vont s’envoler, il n’y a qu’un pas que je ne franchirai pas. Et puis vous avez tous ceux qui sont confrontés à des problèmes plus structurels – je pense bien sûr en particulier au Brésil – qui eux à mon avis ne sont pas sortis de l’auberge. Donc, il faudra attendre la mise en œuvre de vraies politiques de réforme dans ces pays pour pouvoir à nouveau les jouer. Donc, le concept pays émergents, oui, sans doute, avec une certaine prudence. Je pense que ce sera contrasté et sans doute peut-être un peu plus long que ce que les gens pensent.

Web TV www.labourseetlavie.com : Alors, on voit de plus en plus de littérature sur les marchés financiers disant comment vivre dans un environnement de taux d’intérêt négatifs, puisqu’effectivement ça se compte maintenant en trillions de dollars, si l’on veut. Ça veut dire qu’effectivement, il faut revoir sa stratégie d’investissement dans ce contexte-là ?

Philippe de Cholet – Président Matignon Finances : En tout cas, je pense qu’il faut adapter une partie de son allocation d’actifs, en tout cas de l’épargne qu’on a déjà constituée si les taux de rendement devaient baisser quand même trop. Je pense en particulier bien sûr aux contrats en euros, dont les rendements baissent depuis plusieurs années, vous le savez. On est autour de 2 %. On sera sans doute en dessous dans les deux prochaines années. Donc là, il y a quand même des solutions parmi lesquelles le retour en force de l’immobilier côté à travers les SCPI – OPCI. De préférence, à loger dans des contrats d’assurance vie, car au moins, vous évitez les écueils que représentent des droits d’entrée très élevés d’un côté et puis une absence parfois de liquidités. L’assureur se porte garant de la liquidité pour vous de ces produits et il constitue incontestablement une alternative sérieuse au rendement des contrats en euros. Parce que sinon sur les sicav obligataires, vous avez quand même ce risque de remontée des taux qui se profile aux États-Unis de façon très nette, peut-être un jour aussi en Europe. Donc, je pense qu’il n’y a pas grand-chose à attendre au niveau des placements obligataires, à l’exception peut-être de certaines classes d’actifs comme les obligations corporate et encore, il faut être assez sélectif. Mais c’est vrai que le gisement des obligations corporate européennes est sans doute l’un des derniers types de produits obligataires intéressants pour les mois à venir.

Web TV www.labourseetlavie.com : Merci Philippe de Cholet.