Frédéric Rollin Conseiller en Stratégie d'investissement Pictet AM : "On voit plutôt une hausse des taux en septembre aux Etats-Unis".
Bourse : Stratégie et perspectives 2015

27 mai 2015 22 h 25 min
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Selon Pictet AMLes marchés de la zone euro affichent d’excellentes performances depuis le début de l’année. Les bonnes nouvelles ne manquent pas: action massive de la BCE, baisse drastique de l’euro, écrasement de la courbe des taux, plongée des prix du pétrole et retour de la croissance économique. Mais les défis restent nombreux: le dollar US est aujourd’hui largement sur-valorisé et l’économie américaine montre des signes de fatigue, la moyenne des taux allemands est passée en dessous de zéro pour la première fois de son histoire et ne peuvent guère baisser, le Japon ne se remet que très doucement de la hausse de sa TVA et le dégonflement de la bulle de crédit en Chine inquiète“.

Mon invité pour l’évolution de l’allocation d’actifs Frédéric Rollin Conseiller en Stratégie d’investissement Pictet AM qui reste en faveur des marchés actions, avec une préférence pour l’Asie.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Frédéric Rollin, bonjour. Vous êtes conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet Asset Management. On va parler avec vous de ce nouvel environnement sur les marchés, vous avez suivi comme nous, bien sûr, de près ce qui s’est passé notamment sur les taux en Europe, comment vous avez analysé, vous, ces derniers mouvements assez rapides finalement ?

Frédéric Rollin, conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet AM : Sur les taux, je crois que, finalement, ce qu’il est intéressant de voir, c’est que les marchés obligataires sont encore vivants c’est-à-dire que l’on pensait effectivement que les achats massifs de la BCE allaient comprimer les courbes obligataires sur des niveaux très bas, pour longtemps que cela n’allait plus bouger, au contraire, finalement, on a un rebond économique européen, on a un assouplissement quantitatif qui finalement nous fait croire, nous laisse penser en tout cas, que ce rebond économique est durable et donc une renaissance des anticipations d’inflation, et du coup effectivement une hausse des taux. Donc on constate finalement que tout cela répond encore en fondamentaux. Donc les taux montent, pour nous ils vont encore monter. L’économie européenne est bien ancrée dans un retour à la croissance. On commence à voir des signes légers retours de l’inflation, seule la Grèce, sur un an maintenant, est en déflation, donc des taux qui sont encore très, très bas et qui pourraient monter, peut-être refaire une fois ce qu’ils ont fait encore ces dernières semaines.

Web TV www.labourseetlavie.com : En même temps, on a eu, peu de temps après, des déclarations de Monsieur Coeuré à la Banque centrale européenne et lui, finalement, il nous parle du QE de mai et juin, de dire que la Banque centrale européenne sera là pour acheter effectivement en mai juin. Peut-être il y a quelques semaines encore, on se disait « Elle a fait son job et cela allait se calmer », cela contrebalance ou pas ce qui s’est passé ?

Frédéric Rollin, conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet AM : Il y a eu effectivement des éléments techniques, je crois qu’en plus pendant cette période, la BCE a décidé d’acheter des obligations plutôt courtes, du coup les obligations longues ont eu du mal à trouver preneur, d’autant qu’il y a eu beaucoup d’émissions. Donc cela a créé aussi ce mouvement. Je crois qu’effectivement la BCE va continuer d’acheter des obligations et donc maintenir des taux probablement plus bas qu’ils ne devraient être. Mais compte tenu du retour de la croissance économique, on peut estimer que les taux devraient de toutes les façons être plus hauts. Donc, la BCE va être là pour deux choses, pour faire baisser les taux obligataires, en tout cas les maintenir plus bas qu’ils ne devraient, mais quand même un peu plus haut qu’aujourd’hui, et puis si jamais, à un moment donné, hélas, on n’arrive pas à un accord notamment en Grèce, maintenir, je dirais, une certaine cohésion dans le marché obligataire, éviter qu’il y ait trop de vendeurs sur les obligations espagnoles et italiennes, et donc maintenir effectivement une certaine sécurité financière.

Web TV www.labourseetlavie.com : Oui parce que l’on a parlé, en tout cas on a pu voir des titres sur un sell-off, une vente massive, donc cela a pu faire peur à un moment donné en se disant « ça y est, c’est parti » ?

Frédéric Rollin, conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet AM : On parle beaucoup de 94, c’est dans toutes les mémoires, nous on pense qu’effectivement il peut y avoir encore du seff-off sur le marché obligataire, mais pas dans une ampleur telle que l’on a vue en 94 parce que, malgré tout, donc on a des banques centrales qui surveillent ce marché et puis on a une croissance économique en Europe qui reprend certes et aux États-Unis qui va probablement être meilleure, mais on ne retrouvera pas des taux de croissance très, très élevés et on reste quand même dans un environnement faiblement inflationniste, donc dans l’ensemble quand même des taux qui vont rester dans longtemps, mais tout de même pas si bas.

Web TV www.labourseetlavie.com : Du côté des États-Unis, on a vu aussi un certain nombre d’évolutions. Quand on regarde un peu les sondages, il y en a peu qui aujourd’hui anticipe une hausse de taux au mois de juin, cela commence maintenant être clair, on est plutôt sur la deuxième partie de l’année, qu’est-ce qui a changé aux États-Unis pour vous ?

Frédéric Rollin, conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet AM : Aux États-Unis, ce qui est en train de changer, quand même c’est une amélioration sensible des conditions de l’emploi qui fait qu’aujourd’hui, nous on table quand même toujours sur une hausse des taux plutôt en septembre en fait. Donc on voit que les hausses de taux sont quand même en train de se reporter plutôt vers 2016 parce que il y a eu clairement un affaiblissement de l’économie américaine au cours du premier trimestre et le dernier minute du FOMC montre que la Fed en prend compte. Pour nous, malgré tout, on a eu une amélioration des conditions de l’emploi très, très forte. On a un indice que l’on regarde par exemple, c’est celui de la Fed de Kansas qui va passer en territoire positif, probablement autour de septembre, octobre, mais c’est précisément dans les deux derniers resserrements monétaires, à ce moment-là que la Fed a agi. Donc on reste là-dessus. On aura probablement un deuxième trimestre aux États-Unis qui va être en miroir du premier trimestre avec une économie qui va être probablement très forte jusqu’à, pourquoi pas, 4 % de croissance au cours du deuxième trimestre, cela me paraît tout à fait possible.

Web TV www.labourseetlavie.com : Donc là effectivement on reste sur ce scénario avec un peu de volatilité, selon les… ?

Frédéric Rollin, conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet AM : Voilà, le premier trimestre, on a une baisse des investissements pétroliers mais le pétrole est revenu en partie, donc cela devrait se tasser. On a eu une très, très forte hausse du dollar, mais là il s’est stabilisé. On a eu des grèves, elles sont terminées. On a eu un climat très rigoureux, on est maintenant sur le printemps. Donc, dans l’ensemble, beaucoup de facteurs saisonniers qui laissent penser que l’économie américaine va rebondir fortement et puis toujours cette idée de baisse des prix à la pompe qui fait que l’on aura probablement quand même un rebond assez significatif de la consommation américaine. On tablait là-dessus un petit peu plus tôt mais on reste quand même sur cette anticipation, fort rebond à un moment donné de la consommation américaine et donc une croissance qui va repartir assez fort, donc je pense qu’il ne faut pas trop penser à des anticipations… il ne faut pas trop pousser les anticipations de la Fed, ce sera quand même plutôt avant la fin de l’année pour nous.

Web TV www.labourseetlavie.com : Du côté des pays émergents, on avait ces effets pétrole, baisse du pétrole et hausse du dollar des derniers mois, aujourd’hui l’environnement a un peu changé, pas complètement sur le pétrole, mais le dollar, vous l’avez dit, est-ce que cela change le regard de l’investisseur sur ces pays émergents ?

Frédéric Rollin, conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet AM : Oui je pense qu’il y a des choses qui sont en train de changer. D’abord si on a effectivement ces chiffres économiques États-Unis, il va y avoir des pays, notamment en Asie, qui vont assez largement profiter du rebond de la consommation, de la consommation américaine. Je pense qu’aussi, en termes d’investissement, il y a des choses qui sont en train de changer. Je regardais un investisseur, il y a quelques semaines, un investisseur en obligations d’État français, il pensait obtenir 0,50 % par an, il a perdu plus de 4 % en quatre semaines. Donc on se dit aujourd’hui peut-être finalement, investir sur des obligations émergentes qui offrent des rendements de 5 % supérieurs à ceux des obligations développées, ce n’est pas inintéressant et ce n’est peut-être pas si risqué que cela. Et quand on regarde les niveaux de valorisation, notamment de ces devises par rapport au dollar, on se dit qu’effectivement c’est probablement le moment d’investir. Donc ce ne serait pas étonnant que l’on ait un retour avec des chiffres de croissance économique qui s’améliore, un retour cette fois-ci plus sur les marchés émergents, notamment les marchés asiatiques en premier lieu.

Web TV www.labourseetlavie.com : Est-ce que, du côté du Japon, il y a plus de visibilité ou il y a un peu toujours des doutes de ce côté ?

Frédéric Rollin, conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet AM : Je pense qu’il y a plus de visibilité. On a toujours cette croissance du crédit qui est là, donc la sortie de déflation est en train de faire son œuvre, et puis, quand on regarde les sondages économiques, que ce soit la confiance des consommateurs, que ce soit la confiance des entrepreneurs, on a quand même une amélioration. On est en train de sortir progressivement, plus lentement que prévu, c’est vrai, mais en tout cas on en sort, du choc créé par la hausse de la TVA l’année dernière, et on a eu notamment une très, très bonne surprise sur le PIB japonais. Et les actions japonaises vont en bénéficier, mais à double titre, d’une part parce que l’économie est en train de s’améliorer, et d’autre part, parce que, l’optimisme revenant, ces entreprises qui aujourd’hui ont beaucoup de cash, vont commencer à le mettre au travail, pas forcément de l’investissement parce que aujourd’hui je pense qu’il ne faut pas trop compter quand même sur l’investissement, il y a des surcapacités mondiales encore assez importantes, mais beaucoup plus en termes de rachat d’actions et de fusions-acquisitions, et c’est ce qui est en train d’arriver, les entreprises japonaises sont en train d’augmenter leur retour sur actions en rachetant leurs actions, et cela, c’est une excellente chose évidemment pour les marchés.

Web TV www.labourseetlavie.com : Le mot de la fin, l’allocation d’actifs, globalement elle reste en faveur des marchés Actions malgré ses soubresauts, là, que l’on a… ?

Frédéric Rollin, conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet AM : Toujours en faveur des marchés actions. On a perdu cette idée de rallye ininterrompu où on avait à la fois un rebond à la croissance et des taux bas pour longtemps. Il faut bien admettre que l’on aura un rebond de la croissance mais que les taux sont en train de monter, donc un marché peut-être un petit peu plus erratique qu’auparavant, mais toujours très positif sur les marchés actions, avec une préférence pour l’Asie, qu’elles soient Japon ou qu’elles soient émergentes.

Web TV www.labourseetlavie.com : Merci Frédéric Rollin.

Frédéric Rollin, conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet AM : Merci.

 

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