Julien-Pierre Nouen Economiste - Stratégiste Lazard Frères Gestion : "Les actions de la zone euro restent un actif de choix".
Bourse : Stratégie d'allocation d'actifs

27 septembre 2015 18 h 43 min
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Après le statu quo de la Fed, l’allocation d’actifs doit-elle évoluer ?

Les marchés ont été largement perturbé par la panne de croissance chinoise mais le statu quo de la Fed n’a pas forcément rassuré sur la vigueur de l’économie mondiale et américaine en particulier.

Perspectives d’investissement avec mon invité Julien-Pierre Nouen Economiste – Stratégiste Lazard Frères Gestion

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Julien-Pierre Nouen, bonjour.

Julien-Pierre Nouen – Économiste Stratégiste – Lazard Frères Gestion : Bonjour.

Web TV www.labourseetlavie.com : Vous êtes stratégiste économiste chez Lazard Frères Gestion. On va parler avec vous d’actualité économique, avec peut-être un petit focus pour commencer sur l’Europe, la zone euro. C’est vrai qu’il y a des sujets aujourd’hui humains avec les réfugiés, mais quand on s’intéresse à l’économie européenne, est-ce qu’elle est aujourd’hui en meilleure forme ? On avait ce sentiment-là il y a quelques semaines. Est-ce que ça s’améliore ou est-ce que c’est encore assez long ?

Julien-Pierre Nouen – Économiste Stratégiste – Lazard Frères Gestion : Les dernières révisions du PIB de la zone euro sur le premier et le deuxième trimestre 2015 montrent qu’on a véritablement une amélioration. Au premier trimestre, on a eu le premier chiffre de croissance supérieur à 2 % depuis 2011. Le chiffre était un peu en retrait au deuxième trimestre, mais c’est la volatilité qu’on observe généralement d’un trimestre sur l’autre. Lorsqu’on regarde les indices PMI qui pour nous sont les meilleurs indicateurs de l’activité économique, ils pointent sur une croissance qui devrait rester tendanciellement autour de 2 % annualisé, c’est-à-dire un rythme relativement important par rapport à la croissance potentielle de la zone euro. Ce qui permet au taux de chômage de baisser assez rapidement et donc une bonne nouvelle puisque ça permet de mettre en place des cycles vertueux sur la croissance économique de la zone euro.

Web TV www.labourseetlavie.com : Donc, un meilleur panorama est en train de se dessiner pour la zone euro.

Julien-Pierre Nouen – Économiste Stratégiste – Lazard Frères Gestion : Voilà ! Un autre facteur qui est très important à prendre en compte, c’est ce qu’on observe au niveau du marché du crédit. Lorsqu’on regarde l’enquête de la BCE sur les conditions d’octroi de crédit, on reste à l’assouplissement de la part des banques. Et lorsqu’on regarde les chiffres de l’évolution du crédit sur les derniers mois, on voit que la croissance des encours de crédit est en train d’accélérer. Et donc ça, ça va permettre de débloquer notamment l’investissement qui était un peu le deuxième moteur de la reprise économique, qui tardait à se mettre en route, mais qui va le faire.

Web TV www.labourseetlavie.com : On pouvait avoir des inquiétudes par exemple avec l’Allemagne quand on voyait ce qui se passait en Chine, c’est-à-dire ce ralentissement chinois. Alors, on ne parle pas encore de hard landing, mais on parle de vrai ralentissement. La Chine aujourd’hui, c’est un sujet d’inquiétude sur le plan économique ?

Julien-Pierre Nouen – Économiste Stratégiste – Lazard Frères Gestion : Alors, c’est un pays qui est évidemment sous surveillance pour nous, mais on n’est pas plus inquiets que ça. Lorsqu’on regarde notamment l’impact, la nature du ralentissement économique chinois pour nous est plutôt bénéfique pour l’économie mondiale parce qu’on est en train de passer d’une économie d’investissement intensif à une économie de consommation. Et lorsqu’on regarde notamment les exportations des pays développés vers la Chine, elles sont tout à fait stables. Elles ont un peu ralenti, mais elles ne s’effondrent pas. Donc là-dessus, c’est assez rassurant. Les importations finalement qui baissent pour la Chine, c’est tout ce qui est, on va dire, lié aux matières premières, au ciment, au cuivre, donc ce qui avait accompagné cette bulle d’investissements immobiliers et résidentiels. Et finalement, on a le dégonflement de cette bulle qui fait des gagnants et des perdants, mais globalement pour l’économie mondiale, ça devrait être bon.

Web TV www.labourseetlavie.com : Pour les investisseurs, bien entendu, depuis des mois, on s’intéresse à ce qui se passe aux États-Unis. Et avant de parler du sujet taux, l’économie américaine, est-ce qu’elle est vraiment en phase de progression ? On a toujours ce sujet. Est-ce que la politique monétaire accommodante a aidé cette reprise économique ?

Julien-Pierre Nouen – Économiste Stratégiste – Lazard Frères Gestion : Alors oui, le reprise économique a été aidée par la politique monétaire, mais elle a été aussi entretenue par le temps qui passe et les effets d’entrainement au sein de l’économie. C’est-à-dire qu’on a un taux de chômage qui a baissé nettement, des excès dans le secteur résidentiel qui ont été totalement résorbés. Et lorsqu’on regarde les indicateurs de l’activité de la construction, on peut être très optimiste sur les prochains mois aux États-Unis et donc ça, ça accompagne ce mouvement de normalisation de l’économie américaine. Le taux de chômage baisse rapidement, ce qui devrait amener la FED a remonté ses taux très rapidement.

Web TV www.labourseetlavie.com : Sur la transmission de la politique monétaire, cette politique monétaire accommodante à l’économie, on s’interroge toujours. Est-ce que ça a été efficace et est-ce qu’on va retrouver ce potentiel pour les États-Unis ? On se dit que ça ne sera peut-être pas ce qu’il y avait avant la crise de 2008.

Julien-Pierre Nouen – Économiste Stratégiste – Lazard Frères Gestion : Alors, sur la transmission de la politique monétaire, on a pu voir que les taux sur les prêts hypothécaires avaient fortement baissé. Lorsqu’on regarde le ratio d’obligation financière des ménages américains, c’est-à-dire le pourcentage de leurs revenus disponibles consacrés aux intérêts et au remboursement du principal, on est revenu au plus bas depuis le début des années quatre-vingt. Donc, la politique monétaire de la FED a permis justement d’accompagner le deleveraging, désendettement des ménages américains. Sur la question de la croissance potentielle, on a un facteur notable qui est que les générations du baby-boom arrivent à l’âge de la retraite, donc, la croissance de la population active ralentit. Elle reste supérieure à ce qu’on observe dans la zone euro. Le facteur par contre qui devrait rester très positif, c’est la croissance de la productivité aux États-Unis qui reste sous-tendue par un dynamisme, notamment dans le secteur de la technologie qui est plus important. Alors effectivement, peut-être qu’auparavant, la croissance potentielle de l’économie américaine était plutôt autour de 3 %. On a sans doute un peu ralenti, mais pour nous, on devrait rester autour de 2,5 %, un peu plus peut-être, mais le ralentissement n’est pas très significatif.

Web TV www.labourseetlavie.com : Un mot du Japon. On a eu quelques inquiétudes sur l’économie japonaise. Est-ce qu’il y a effectivement là un peu la fin des effets ou en tout cas du « miracle » des Abenomics ?

Julien-Pierre Nouen – Économiste Stratégiste – Lazard Frères Gestion : Alors, l’Abenomics a produit des effets, mais les effets ont été concentrés finalement dans la profitabilité des entreprises. Lorsqu’on regarde toutes les variables économiques, on voit que la consommation après un départ un peu en fanfare ne s’est pas vraiment remise de l’augmentation de la TVA. Les revenus, les salaires, malgré un marché du travail qui se tend de moins en moins, devraient amener une forte progression des salaires. Les salaires tardent à accélérer. C’est peut-être simplement une histoire justement de délai de transmission. Mais par contre, lorsqu’on regarde les profils des entreprises, on voit qu’on a eu une très forte croissance grâce à la baisse du yen, grâce aussi à l’amélioration de la rentabilité des entreprises et c’est pour ça que cette politique s’est concrétisée par une très bonne performance du marché boursier japonais.

Web TV www.labourseetlavie.com : Le mot de la fin justement pour les investisseurs. Quand ils regardent un peu cet univers d’investissements, il y a donc des zones où ça va un peu mieux, il y a des marchés qui avaient bien progressé, d’autres endroits où effectivement, on a écrasé la bulle notamment en Chine. Comment évolue l’allocation d’actifs chez vous justement ?

Julien-Pierre Nouen – Économiste Stratégiste – Lazard Frères Gestion : Alors, nous avons profité de la faiblesse de la fin du mois d’août pour réaugmenter nos expositions aux actions de la zone euro. On pense que les actions de la zone euro restent l’actif de choix, parce qu’on a une histoire économique qui va dans le bon sens. On a aussi un levier opérationnel qui est plus important. Donc, on devrait continuer à avoir une bonne croissance des résultats sur l’année prochaine. On est un peu plus prudents sur les actions américaines, principalement parce que les marges sont élevées, donc on a plus un risque baissier un peu plus important. On pense que les taux d’intérêt à long terme vont remonter, donc pénalisant un petit peu les marchés obligataires. Néanmoins, lorsqu’on regarde tout cela du point de vue d’un investisseur européen, la politique de la Banque Centrale Européenne va rester accommodante. On a eu des discours plutôt colombes, donc propices à une politique monétaire accommodante de la part de Mario Draghi ou de Vítor Constâncio. Et donc ça devrait éviter une forte emballée des taux. Donc, on pense qu’il est intéressant d’aller sur des classes d’actifs obligataires un peu plus risquées, comme le crédit subordonné financier où on a un supplément de rendement qui reste assez important ou du rendement européen.

Web TV www.labourseetlavie.com : Merci Julien-Pierre Nouen.

Julien-Pierre Nouen – Économiste Stratégiste Lazard Frères Gestion : Je vous en prie.

 

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