Tv Bourse : Interview Dimitri Meyer Gérant SPGP : "La ré-industrialisation américaine est déjà en route".
La révolution de l'énergie aux Etats-Unis : perspectives pour les investisseurs

13 mai 2014 15 h 47 min
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Web TV www.labourseetlavie.com : Dimitri Meyer, bonjour. Vous êtes gérant chez SPGP, on va parler avec vous de pétrole et de gaz non conventionnel, comme on dit, avec, on peut le dire, une révolution qui est en train de se passer aux États-Unis. Alors, on a toujours un peu de mal à mesurer ce qui se passe sur ce marché américain, on en est où justement sur cette évolution-là ? On peut dire déjà que ces nouvelles productions ont changé la donne sur le marché pétrolier ?

 

Dimitri Meyer, gérant de SPGP : Les nouvelles productions en Amérique du Nord ont changé la donne et vont continuer à changer la donne puisque pour donner une idée ces nouvelles technologies du forage horizontal et du fracturing sont apparues ensemble au début des années 2000 et que les États-Unis sont d’ores et déjà redevenus premier producteur de gaz au monde et redeviendront premier producteur de pétrole devant l’Arabie Saoudite et devant la Russie à l’horizon 2020. Donc on est qu’au début de cette tendance, et dans la foulée, en 2035, les États-Unis deviendront même indépendants énergétiquement.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Est-ce que aujourd’hui par rapport… parce que quand on regarde les matières premières, le prix du pétrole, on pourrait dire qu’effectivement il est « bas », qu’en tout cas il est loin des niveaux qu’il avait atteint il y a quelques années encore…

 

Dimitri Meyer, gérant de SPGP : C’est discutable.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Voilà, on peut en parler mais est-ce qu’il y a déjà un impact ou ce n’est pas encore le cas, l’impact justement de ce gaz américain ?

 

Dimitri Meyer, gérant de SPGP : Il y a eu des impacts notamment au niveau du prix du pétrole sur le continent américain, mais ce sont des situations relativement techniques, mais juste pour parler du pétrole au niveau mondial, le pétrole de référence est le brent, cela fait maintenant plus de trois ans que l’on évolue dans un canal 100-120 $, disons avec une moyenne d’à peu près 110 $ le baril, et c’est tout simplement la période la plus chère de l’histoire pour le pétrole. Certes on n’a pas eu un nouveau pic, un nouvel excès comme on avait pu connaître à l’été 2008, vers les 150 $, mais si on regarde les moyennes lissées, c’est tout simplement le plus haut niveau de pétrole jamais atteint. Après il y a eu ponctuellement un décrochage au niveau de l’Oklahoma aux États-Unis, qui est au centre des États-Unis, qui est là où est fixé le pétrole de référence WTI, mais l’écart entre le prix brent et le prix américain s’est d’ores et déjà rétréci grâce à des investissements dans les infrastructures.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Oui, ce que l’on mettait souvent en avant, le fait que la croissance chinoise ralentissant, effectivement connaissant le rôle de la Chine sur ces marchés-là, que le prix aurait pu peut-être être plus bas ?

 

Dimitri Meyer, gérant de SPGP : Effectivement, mais le marché du pétrole est un marché complexe. Il y a effectivement une demande qui est peut-être un petit peu moins forte que ce que l’on pouvait penser il y a quelques années avec notamment les problèmes chinois, mais également les optimisations de consommation au niveau des pays développés puisque l’OCDE consomme de moins en moins de pétrole, ayant optimisé et continuant à optimiser sa consommation. En revanche, comme on le sait, il y a beaucoup de tensions géopolitiques notamment sur le marché mondial du pétrole, récemment on parle de l’Ukraine, mais qui parle de l’Ukraine parle des tensions avec la Russie qui est bien sûr productrice et exportatrice de pétrole. Avant cela, on parlait et on parle encore de la Syrie, de la Libye, de l’Égypte, de différentes zones d’instabilité géopolitique qui en fait équilibrent la baisse de la demande.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Oui parce que l’on pensait aussi à l’Irak qui aurait dû revenir beaucoup plus sur ce marché-là, et là on voit que ce n’est pas encore le cas.

 

Dimitri Meyer, gérant de SPGP : Effectivement l’Irak, on peut parler également du Nigéria où il y a des tensions, et ainsi de suite, et ainsi de suite.

Web TV www.labourseetlavie.com : Si on revient aux États-Unis, ce qui est en train de se passer selon vous va modifier, on va dire, durablement à la fois l’économie américaine mais aussi pour tous les acteurs de cette filière-là ?

 

Dimitri Meyer, gérant de SPGP : Oui, cela va modifier durablement parce que les États-Unis qui, depuis des décennies, étaient un pays importateur d’énergie, on a souvent parlé de sécurité énergétique pour parler de la situation américaine, c’est un pays qui connaît, depuis le début des années 70, une diminution de sa production de pétrole, connaît désormais une production très forte hausse. Les États-Unis vont devenir indépendants, donc bien sûr cela va favoriser toute une chaîne d’acteurs, que ce soit les producteurs, bien sûr les INP locaux, mais également tout le domaine des services et également le domaine des infrastructures énergétiques où il faut investir plusieurs centaines de milliards de dollars dans les 20 prochaines années. Cela va également favoriser l’industrie pétrochimique en particulier américaine qui est déjà en train de se réindustrialiser et cela va favoriser à terme les sociétés exportatrices de pétrole et de transport. Donc vous voyez, c’est très large, ce n’est pas exhaustif, mais c’est un domaine très large qui est affecté au niveau américain. Et bien sûr, si on regarde au niveau mondial, cela va complètement changer et cela a déjà commencé à changer les équilibres géopolitiques et géostratégiques mondiaux.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Alors, on peut voir aussi des entreprises américaines qui relocalisent dans certains secteurs effectivement aux États-Unis, cette idée d’une énergie moins chère ou en tout cas à un meilleur prix pour ces acteurs-là, cela peut être décisif effectivement ?

 

Dimitri Meyer, gérant de SPGP : C’est d’ores et déjà décisif, une énergie moins chère et surtout, je dirais, sûre et durable dans le temps. On a des exemples même de sociétés pétrochimiques en l’occurrence canadiennes, mais qui avaient des usines au Chili, qui démontent cette usine en plusieurs parties pour la transformer, la transporter par bateau et la réinstaller au Texas. Donc c’est d’ores et déjà en cours. La ré-industrialisation américaine, grâce à une énergie abondante et sûre au niveau local, est déjà en route.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Là, vous donnez des horizons 2030, donc des horizons finalement moyen terme, cela veut dire qu’il y a un certain nombre d’acteurs qui effectivement vont être positionnés sur ce créneau-là et qui vont pouvoir avoir de la visibilité sur ce segment ?

 

Dimitri Meyer, gérant de SPGP : Il y en a qui sont déjà positionnés et d’ailleurs, dans le cadre de la gestion du fonds que je gère, Tectonic Fund, nous avons des investissements diversifiés grâce à toute cette diversification justement qui est permise par la thématique dans des acteurs, que ce soit au niveau des producteurs qui vont eux avoir un risque, je dirais, lié à l’évolution du prix du baril ou du gaz, mais également dans d’autres domaines où des sociétés ont tout simplement de la croissance sans même prendre de risques sur la valeur des matières premières sous-jacentes.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Sur le marché du gaz, ce gaz de schiste amènera forcément à une baisse de prix ou ou pas, compte tenu de l’activité économique mondiale, ce n’est pas forcément évident ?

 

Dimitri Meyer, gérant de SPGP : C’est un petit peu tôt pour le dire, ce qui est sûr, c’est que plus il y a d’offres en général, plus les prix ont tendance à être bas, mais tout dépend en fait du rythme auquel ce sera produit. On a vu aux États-Unis puisque pour l’instant les marchés sont plutôt locaux au niveau du gaz, que les prix du gaz avaient beaucoup baissé quand il y avait eu cette augmentation assez forte du gaz, mais les prix ont progressivement remonté, tout est une question d’équilibre. Dès qu’il y a une nouvelle offre qui apparaît brusquement, les marchés sont un petit peu pris à revers, je dirais, mais quand c’est plus stable et plus prévisible dans le temps, comme cela commence à l’être, on peut avoir un environnement donc plus serein.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Donc quelque part quand aujourd’hui on regarde le marché des matières premières, on a tendance à, même si on parlait de ce baril à 120, à dire que finalement il y a un cycle plutôt baissier sur ces matières premières, quand regarde le plus fondamental, finalement le plus intéressant c’est de voir ce qui se passe aux États-Unis aujourd’hui ?

 

Dimitri Meyer, gérant de SPGP : Alors, tout dépend de quelle matière première on parle puisque effectivement si on part du minerai de fer ou du cuivre, ce sont des fondamentaux totalement différents du domaine de l’énergie. Dans le domaine de l’énergie, ce sont des fondamentaux totalement différents si on parle du pétrole ou si on parle du gaz ou même si on parle des produits liquides de pétrole ou des produits liquides de gaz qui sont des marchés très différents. Et nous justement tout notre rôle, tout notre but est de jouer cette poche ou ces thématiques, que ce soit dans le domaine du gaz ou du pétrole, pour bénéficier de ces différences spécifiques.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : Il peut y avoir des grands acteurs, mais vous allez aussi chercher des Midcap  américaines dans ce domaine-là ?

 

Dimitri Meyer, gérant de SPGP : Oui, il y a beaucoup de Midcap dans ce domaine, pas que des grands intervenants, bien au contraire, puisque pour prendre le cas caricatural, qui était le gaz de schiste, a été complètement manqué par tout ce qui était Majors, les Majors ne croyaient pas du tout en la thématique, ne croyaient pas du tout en cette technologie, on voit qu’elles se sont complètement trompées et c’est d’ailleurs pour cela qu’Exxon a fini par débourser plus de 40 milliards de dollars pour acheter à l’époque le leader dans le domaine du gaz de schiste puisque les Majors ont tendance, je dirais, à un petit peu être après la vague. Alors, elles essaient de se rattraper, mais ce sont bien les Midcap et les sociétés de croissance qui font le jeu dans le domaine du pétrole et du gaz de schiste, je parle bien au niveau des producteurs.

 

Web TV www.labourseetlavie.com : On suivra ce secteur-là et cette révolution qui est en train de se passer aux États-Unis. Merci Dimitri Meyer d’avoir fait le point avec nous.

  

Dimitri Meyer, gérant de SPGP : Merci à vous.

 

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